LE MANAGEMENT COOPÉRATIF:"GAGNANT / GAGNANT"par Michel VAUGRANTE de NOVINCECONSULTANT AU C.C.A. |
SUMMARY
The cooperative management in real time and the systemic analysis
are presented according to the Axelrod theory. They are based on
the famous prisoner's dilemma applied to management and human
relationship.
RÉSUMÉ
En cette époque de changement et d'adaptation permanents plus ou
moins forçés dans la société contemporaine, cet article
propose une solution pour s'adapter à ces nouvelles exigences.
Conjointement avec le management coopératif en temps réel selon
les travaux d'Axelrod basés sur le fameux dilemme du prisonnier
appliqué au management et aux relations humaines, il est
présenté également l'analyse systémique.
AVERTISSEMENT: Copyright © by Michel Vaugrante de Novince, 1996. Tous droits réservés. La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit sans le consentement de l'auteur est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.
Voici la méthode "Management Coopératif en Temps Réel" élaborée à partir des travaux de différents chercheurs américains qui ont eux-mêmes établi leurs conclusions à partir du dilemme du prisonnier appliqué au gouvernement des Sociétés. Le fameux dilemme du prisonnier a été imaginé dans les années 50 par Melvin Dresher & Merril Flood de la Rand Corporation. De nombreux écrits lui ont été consacrés en particulier pour l'étude des relations internationales et plus particulièrement dans le domaine de la course aux armements nucléaires. Robert AXELROD grâce aux travaux d'Anatol RAPOPORT l'a rendu célèbre dans son ouvrage "The Evolution of Cooperation" (prix Newcomb 1981) dont des éléments ont été développés dans l'ouvrage de Douglas HOFSTADTER traduit en français sous le titre de "Ma Thémagie" . Ce dilemme se présente ainsi: on propose à deux complices prisonniers qui ne peuvent pas communiquer entre eux le marché suivant: "Si tu dénonces ton copain, tu auras la vie sauve et l'autre sera condamné à 20 ans; par contre si vous vous dénoncez mutuellement, vous écoperez chacun de 10 années de prison; enfin si aucun de vous deux ne parle, vous aurez chacun par suite du doute 2 ans " . Le dilemme se pose de décider si on doit coopérer ou si on doit être un défecteur. Il est évident que la meilleure solution pour les deux compères est de garder le silence. Mais très rapidement l'un d'eux va penser que "si..., alors..., donc... je parle et je dénonce mon copain" ! Il est tout évident que si l'un fait ce raisonnement, l'autre peut également le faire. D'où un résultat avec deux perdants au lieu de deux gagnants et il ne peut en être autrement.
Par contre si on imagine que les personnages vont devoir faire face au même dilemme un nombre infini de fois, le résultat peut devenir totalement différent car la décision antérieure de l'autre va déterminer la prochaine décision, et cela mutuellement. Et c'est bien ce qui se passe quotidiennement dans les relations personnelles. Le problème est de savoir s'il faut mieux coopérer ou s'il faut mieux faire défection et adopter un comportement égoïste. On répondra qu'il faut mieux coopérer, quoi que... et on va voir que dans les faits les sociétés favorisent un comportement de défecteur plutôt qu'un comportement de coopérateur. Se pose alors "La question: la coopération peut-elle apparaître dans un monde peuplé d'égoïstes? se décompose en trois parties. La première est: comment le processus peut-il s'amorcer? La seconde: les stratégies de coopération sont-elles mieux armées pour la survie que leurs rivales? Enfin la troisième: quelles sont les stratégies de coopération qui obtiendront les meilleurs résultats et comment deviendront-elles prédominantes"(Douglas HOFSTADTER).
La place nous manque dans ce bref article pour analyser en profondeur l'extraordinaire richesse des applications du Management Coopératif dans la conduite de la Société en général et dans le management d'une Entreprise en particulier. Le lecteur aura compris que la position de coopérant est la meilleure position lorsqu'il s'agit d'une relation durable aux intérêts mutuels. Mais qu'est-ce qui peut empêcher cette relation de coopération? Vous aurez aussi compris qu'une transaction sans avenir ou dont les membres s'ignorent va favoriser un comportement de défecteur (ou d'égoïste et de chacun pour soi). Les conséquences sont énormes. Par exemple la naissance de la civilisation au moyen orient et autour du bassin méditerranéen n'a pu se réaliser entre autres que parce qu'il existait une possibilité d'alimentation régulière grâce aux troupeaux de moutons qu'il était possible de laisser paître à volonté n'importe où, la propriété privée des pâturages n'étant pas encore reconnue. Le berger va donc chercher à augmenter au maximum son cheptel sans tenir aucunement compte de la gestion des possibilités de pâturage. "Si je n'augmente pas mon troupeau, le voisin va bien le faire, donc...". Ce qui veut dire qu'un mouton en plus = un avantage personnel proche de +1, mais quand tous le font, l'avantage n'est plus qu'une fraction de -1. Il n'est certes pas possible d'augmenter à l'infini un troupeau sur un territoire limité ouvert à tous. Depuis d'Alembert, on sait pourtant qu'il est impossible de maximaliser deux variables, en d'autres termes on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre ou encore il ne sera jamais possible que tous les bienfaits soient distribués à tous!!!
Ainsi se développe un management de défecteur du chacun pour soi puisque celui qui ne se comporterait pas ainsi serait perdant à coup sûr. Résultat: d'abord un gaspillage puis les "terres" se désertifient ou s'aridifient. Garrett HARDIN , dans son étude parue "Sciences" du 13 décembre 1968, (n° 3859): "The Tragedy of the Common" traitant de la surpopulation où la majorité de la planète se comporte en défecteur, nous offre l'image d'un pâturage communal où chaque berger se comporte ainsi en défecteur. Les océans qui appartiennent à tout le monde et à personne autorisent tous les pêcheurs à extraire au maximum les richesses maritimes, puisque encore :"si je n'en profite pas, l'autre bateau (ou l'autre compagnie) va bien en profiter, donc...!" . Pour la plupart des conducteurs, la conduite automobile relève du même type de management ! "Les autres le font, alors moi aussi, sinon je serais idiot de ne pas faire la même chose".Chacun devient ainsi défecteur. Et pour un malade, la relation va-t-elle être du type défecteur ou coopérateur vis-à-vis de son corps? Très bonne question, n'est-ce pas! Avec les problèmes de pollution actuelle nous sommes "en plein" dans la même situation qu'au moment de la désertification de régions entières de la planète par suite de cette liberté de pâturage et de prolifération de cheptel. Sous d'autres latitudes et en d'autres époques, selon WHELAN de l"Institute of Economic Affairs et auteur de "Wild in Woods: theMyth of the Noble Eco-Savage", les peuples natifs des Amériques sont responsables de l'extinction d'espèces animales et végétales sur une échelle bien plus importante que ne l'ont fait les Européens. Par exemple, le castor géant, le chameau et le cheval à deux orteils avaient déjà disparu avant l'arrivée de C. Colomb. Les Aborigènes d'Australie ont procédé de même et l'arrivée des Maoris en Nouvelle Zélande a été suivie de l'extinction de 34 espèces d'oiseaux.
La Sécurité Sociale, on l'a compris, est un champ communal où chacun peut venir faire paître ses moutons sans contrôle (ou si peu) et gratuitement, donc profitons-en pour augmenter notre cheptel, c'est-à-dire pour bénéficier des avantages offerts par cette société aussi permissive... Il peut être intéressant de savoir à quel moment cette "terre communale" de la Sécurité Sociale sera devenue aride et stérile, c'est-à-dire quand le budget sera-t-il devenu stérile? C'est un véritable dilemme du prisonnier, mais dilemme qui est un "problème sans solution technique" pour reprendre l'expression de Wiesner et de York lorsqu'ils concluent leur remarquable article paru dans "Science" (n°4) sur la guerre nucléaire et la course aux armements. (voici un autre magnifique exemple du dilemme du prisonnier).
Il apparaitrait que le président Jacques Chirac lui-même soit devenu un adepte du management coopératif. En effet il utilise les termes de société gagnant/gagnant et dans son discours donné en décembre 1998, au cours du sommet franco-britannique tenu à Saint-Malô, il déclare textuellement: "Si nous partons du principe que tout ce qui est à moi est à moi et que tout ce qui est aux autres peut être partagé, on va à l'échec".
Il semblerait que les Hommes n'aient trouvé qu'une seule solution pour maîtriser et gérer une telle situation, c'est de développer le sens de la propriété privée qui entraîne évidemment le sens de la responsabilité personnelle. D'où, dans un premier temps, l'invention d'un type de société agricole qui mis au point des mécanismes de régulation des biens communaux.
Nous sommes bien souvent dans un type de management de défecteur où chacun est perdant. "L'apathie au niveau individuel devient la folie au niveau collectif"(Robert AXELROD). Faire défection c'est avoir un comportement qui pénalise tout le monde si chacun en fait autant, parce qu'il procure un gain certain à court terme (P : gain de punition lorsque les deux parties font défection = 1 au lieu de 3 lorsqu'il y a coopération mutuelle). En définitive, le comportement d'un management par défection relève essentiellement d'une finalité de sécurité immédiate. Instaurer un management coopératif, c'est résister à cette tentation d'un profit à court terme. Peut-être faut-il dans un premier temps avoir recours à la recommandation de John ADAMS d'un gouvernement par des lois et non par des hommes.
Mes interventions de Management Coopératif ont donc pour but d'instaurer un nouveau comportement qui ne recherche plus le maximum de bénéfice mais l'optimum. D'ailleurs selon Garrett HARDIN déjà cité, aucune société n'a jamais atteint son maximum de possibilités. Cette stratégie de l'optimum ne peut pas être gagnante au sens habituel du terme; d'ailleurs s'il existait une telle stratégie gagnante, une autre partie pourrait l'appliquer et battre la première partie, ce qui est absurde; il n'existe donc à long terme que de bonnes stratégies optimales de symétrie. La difficulté dans l'application de ce management coopératif, c'est qu'il peut être bien compris intellectuellement mais qu'il est parfois difficile à appliquer car il renvoie à des tas de conflits personnels en relation avec notre perte de sécurité, la confiance et la relation à l'autre. C'est la raison pour laquelle j'ai mis au point des exercices pratiques que je présente sur un mode ludique. (Par exemple, chaque participant reçoit un nouveau nom et un certain nombre d'années de vie qu'il va devoir gérer au mieux). Mais soyons modeste. Nous devons reconnaître que cela demeure souvent une tâche ardue, non pas de changer, mais simplement d'améliorer les Hommes!
Jean-Louis LEONARD dans Gestions Hospitalières (N° 300°) écrit: "Communiquer, c'est faire confiance à l'Autre, au groupe, à l'entreprise aux prises avec le réel. C'est s'ouvrir au monde sans complexe. Communiquer pour Etre, pour le bien-être de son organisation qui se débat dans un univers souvent hostile". Si nous parvenons à mettre en place cette nouvelle forme de communication que nous offre le Management Coopératif, nous pourrons sans doute réaliser ce souhait.
LES 7 LOIS DU MANAGEMENT COOPÉRATIF EN TEMPS RÉEL |
LOI 1 |
QUAND LE
PARAMÈTRE DE RÉDUCTION P EST SUFFISAMMENT ÉLEVÉ, IL
N'EXISTE PAS DE MEILLEURE STRATÉGIE QUI SOIT
INDÉPENDANTE DE CELLE QU'UTILISE L'AUTRE PARTIE. NOTE: SI L'AUTRE PARTIE UTILISE UNE STRATÉGIE DE REPRÉSAILLES PERMANENTES, IL VAUT MIEUX TOUJOURS COOPÉRER PLUTÔT QUE DE FAIRE DÉFECTION : QUAND G/(1-P) > E + PP/(1-P) OU P > (E-G)/(E-P) QUAND G=3 E=5 P=1 ET S=0 AVEC E>G>P>S ET G>(E+S)/2. |
LOI 2 |
LA STRATÉGIE
DU MANAGEMENT COOPÉRATIF EST COLLECTIVEMENT STABLE SI ET
SEULEMENT SI P EST SUFFISAMMENT GRAND. LA VALEUR CRITIQUE
DE P EST UNE FONCTION DES QUATRE FACTEURS DE GAIN, E, G,
P ET S AVEC 0<P<1. NOTE: LA VALEUR CRITIQUE DE P EST LA VALEUR LA PLUS GRANDE DE (E-G) / (E/P) ET (E-G) / (E/S) |
LOI 3 |
LE FACTEUR DE RÉDUCTION P DOIT ÊTRE SUFFISAMMENT ÉLEVÉ POUR QUE TOUTE STRATÉGIE SUSCEPTIBLE D'ÊTRE LA PREMIÈRE À COOPÉRER SOIT COLLECTIVEMENT STABLE. |
LOI 4 |
POUR QU'UNE STRATÉGIE DE MANAGEMENT COOPÉRATIF DEMEURE COLLECTIVEMENT STABLE, ELLE DOIT ÊTRE PROVOQUÉE PAR LA TOUTE PREMIÈRE DÉFECTION DE L'AUTRE PARTIE. |
LOI 5 |
LA STRATÉGIE D'UN MANAGEMENT SOLITAIRE EST TOUJOURS COLLECTIVEMENT STABLE. |
LOI 6 |
LES STRATÉGIES SUSCEPTIBLES D'ENVAHIR EN GROUPE UN SYSTÈME RÉGI PAR UN MANAGEMENT SOLITAIRE AVEC UNE VALEUR PR D'INTERACTIONS MINIMALE SONT LES STRATÉGIES MAXIMALEMENT DISCRIMINANTES, TELLE LA STRATÉGIE DU MANAGEMENT COOPÉRATIF. |
LOI 7 |
SI UNE STRATÉGIE DE MANAGEMENT COOPÉRATIF NE PEUT PAS ÊTRE ENVAHIE PAR UN INDIVIDU ISOLÉ, ELLE NE PEUT PAS L'ÊTRE NON PLUS PAR UN GROUPE. |
LES QUATRE CONDITIONS DU MANAGEMENT COOPÉRATIF: |
1 |
ÉVITEMENT DES CONFLITS INUTILES EN COOPÉRANT AUSSI LONGTEMPS QUE L'AUTRE PARTIE COOPÈRE; |
2 |
RIPOSTE IMMÉDIATE DÈS LE MOMENT OÙ L'AUTRE PARTIE SE COMPORTE EN DÉFECTEUR; |
3 |
APRÈS AVOIR RÉPONDU À UNE PROVOCATION, INDULGENCE IMMÉDIATE POUR RESTAURER LA COOPÉRATION MUTUELLE; |
4 |
TRANSPARENCE DE SON COMPORTEMENT AFIN DE SUSCITER CHEZ L'AUTRE PARTIE UN COMPORTEMENT DE MANAGEMENT COOPÉRATIF. |
LES QUATRE CONSEILS POUR UN MANAGER COOPÉRATIF : |
1 |
NE PAS ÊTRE ENVIEUX; |
2 | NE PAS ÊTRE LE PREMIER À FAIRE DÉFECTION; |
3 | PRATIQUER LA RÉCIPROCITÉ DANS LA COOPÉRATION COMME DANS LA DÉFECTION; |
4 | DEMEURER SIMPLE. |
MATRICE DES GAINS |
E |
gain du défecteur exploitant un coopérant = 5 |
G | gain de gratification lorsque les deux parties coopèrent = 3 |
P | gain de punition lorsque les deux parties font défection = 1 |
S | salaire du coopérant face à un défecteur = 0 |
RAPPEL:
Le paramètre de réduction est défini par le rapport que les
parties ont la possibilité de se retrouver en contact et de se
reconnaître. L'avenir doit donc peser suffisamment lourd pour
pouvoir développer une stratégie de management coopératif.
A titre de supplément j'aimerais présenter l'Analyse Systèmique avec une parenthèse sur l'accueil et la qualité de service en France; car comment peut-on instaurer un management de qualité "gagnant/gagnant " s'il n'y a pas cette qualité, dont on parle tant actuellement, tout au long de la chaîne en particulier au niveau de la communication en général.
L'Analyse Systémique a été définie comme "un ensemble d'éléments en interaction dynamique, organisé en fonction d'une finalité" (J. de Rosnay, Directeur du Développement et des Relations Internationales à la Cité des Sciences et de l'Industrie à Paris/La Vilette) ou "Une totalité organisée faite d'éléments solidaires ne pouvant être définis que les uns par rapport aux autres en fonction de leur place dans cette totalité"(de Saussure) . En d'autres termes, un système est un ensemble d'éléments qui sont reliés entre eux par un ensemble de relations, de façon à former un tout, qui est distinctement mais relativement isolé de l'environnement. Ce n'est qu'après la découverte de la cybernétique qu'a pu se développer progressivement le concept de système grâce aux travaux de chercheurs tels que L. on Bertalanffy, N. Wiener et Shannon. En France la systémique s'est faite connaître grâce aux ouvrages de J. de Rosnay, Le Moigne, E. Morin, J. Mélèse. Quant aux applications de la cybernétique à la psychologie, j'ai eu le plaisir de traduire l'ouvrage du docteur Maxwell MALTZ publié sous le titre de "Psycho-Cybernétique".
Qu'est-ce que la systémique? C'est une nouvelle méthodologie considérant qu'il existe dans tout système quatre secteurs, dénommés: structure, système en lui-même, réseaux et champ d'évolution. Chacun de ces secteurs va évidemment agir et réagir en interaction avec les autres secteurs et s'organiser avec des niveaux de hiérarchie d'une complexité croissante.
La structure constitue le premier élément qui va commencer à s'organiser avec des niveaux élémentaires de hiérarchie allant vers une complexité croissante.
Le second secteur ou système en lui-même, est le lieu de "fabrication" ou de production à travers lequel va transiter les flux d'entrée (par exemple les malades d'un hôpital). Par son action ce système fabrique de l'ordre (à travers les soins) mais aussi de l'entropie ou énergie qui n'est plus disponible pour le système (la guérison). Pour l'hôpital, il se retrouve, par exemple, dans le système de fonctionnariat, la grille des plannings et des salaires.
Le troisième élément est constitué d'un système de réseaux. Il y a d'abord tous ces réseaux de communication internes et externe à l'Etablissement (télécommunications, journal d'hôpital, notes de service), dans un sens plus subtil toutes ces communications plus ou moins verbales (badges, logo, carte de visites, couleurs, l'amicale, etc.). Ensuite il existe un autre réseau de communication et qui constitué de boucles de rétroaction. La comparaison la plus simple d'une telle boucle nous est donnée par un thermostat qui renvoie au brûleur un "ordre" de mise en marche ou d'arrêt pour "obéir" au programme d'objectif mis dans sa mémoire. Cette boucle de rétroaction (feedback en anglais) maintien le système selon une régulation automatique afin de répondre aux objectifs. Cette boucle est visible c'est-à-dire qu'on a une vision, plus ou moins claire, de la concordance avec les objectifs. Ainsi pour un établissement public, ce maintien par régulation s'effectue entre autres grâce aux évaluations régulières des agents, au retour d'information par des entretiens ou des réunions de travail; ce retour est donné également, quoiqu'on l'oublie trop souvent, par un système efficace de traitement des réclamations des usagers qui remplit alors son but d'amélioration du service ceci en parallèle avec un système de boîte à suggestions ou d'enquête en fin de séjour. On voit déjà l'importance du retour d'information sans lequel on va naviguer dans un brouillard plus ou moins épais. D'où l'urgence de mettre en place plusieurs types de "senseurs".
Il existe une autre boucle de rétroaction, plus "grande" si on peut dire et que nous verrons un peu plus tard.
Le quatrième et dernier élément d'une organisation étudiée à travers le prisme de l'analyse systémique est représenté par l'environnement, ce mot devant être interprété dans un sens très large et en concordance avec la nature de l'organisation en cause. C'est en quelque sorte la frontière entre le "nous" et le "eux". Il va y avoir entre ces deux mondes des points de contact et de friction. C'est ici que se situe les véritables problèmes à long terme d'une Entreprise car cet environnement l'agresse en permanence, en conséquence le système tout entier va devoir s'adapter à cet environnement fluctuant et insaisissable et cette adaptation plus ou moins subie va générer une évolution. Par exemple, pour un établissement hospitalier, cet environnement se situe dans la population locale potentiellement malade, dans la concurrence avec les cliniques privées; ce peut être aussi le monde des influences politiques; position bien souvent inconfortable des relations avec l'autorité de tutelle, la DDASS, le C.A. qui obligent à composer donc à découvrir un compromis d'adaptation.
La grande boucle de rétroaction annoncée plus haut va s'insérer entre ce point de contact avec l'environnement et l'entrée des énergies dans le système général. Nous n'avons plus affaire à un maintien par régulation comme avec un thermostat mais ici vient prendre place un maintien transparent de l'organisation par évolution. Pourquoi transparent? Parce qu'il est la plupart du temps totalement inconscient et qu'on possède peu de possibilités pour agir sur lui en prise directe. Ce retour d'information positif ou négatif va donc agir insensiblement pour renforcer ou diminuer le nombre d'entrées selon la réputation renvoyée, l'image donnée par l'hôpital.
Le quatrième élément inclut également le schéma de la culture d'entreprise ou le projet d'établissement, qui démontre, s'il en était besoin, que nous sommes entrés dans une époque où chaque organisation va se trouver confrontée à une zone d'incertitude ou un environnement créateur de crise mais tout autant de défis et de mutations.
Les théories classiques ont étudié des organisations sans hommes; l'approche systémique englobe la totalité des éléments du système étudié, tant du point le plus matériel que du point de vue des relations interpersonnelles des hommes qui le construisent, l'habitent et le font vivre, tentant de réaliser l'ambition d'une intégration des différences.
Un dernier point à ne pas sous-estimer. Nous avons vu plus haut que la rencontre avec l'environnement amène une évolution du système. Cependant on peut poser la question de savoir s'il faut subir cette adaptation ou s'il n'est pas mieux de laisser son empreinte sur l'environnement tout en s'y adaptant. Il semble évident que jusqu'à une époque récente, le service public, malgré les apparences et à cause d'une sorte d'infaillibilité intérieure paradoxalement conjointe à une recherche permanente de sécurité (les deux se renforçant), subissait largement son environnement par manque d'esprit de risque, de nouveauté, de conquête de nouveaux marchés
En ce qui concerne l'accueil, il faut se rendre à l'évidence qu'on le veuille ou non: la qualité d'accueil dans la société française est absolument déplorable. Bénéficiant en partie de la culture française et américaine, je suis souvent mal à l'aise par cette absence de qualité d'accueil dans la relation commerçant/client et administration/usager. Un énorme travail est à entreprendre, il est évident que tout le personnel de toutes les entreprises et administrations mériterait de recevoir une formation. Je voudrais citer "en exemple" les Etablissements Hospitaliers. Non pas que ce personnel ne soit pas à la hauteur de sa tâche. Il effectue consciencieusement son travail, il est aimable et rempli son emploi de son mieux.
Au cours de la rédaction de cet article, une chute dans un escalier m'a obligé à être hospitalisé d'urgence à l'hôpital de Granville. Là aussi j'ai constaté ce même comportement. On pourrait plagier un titre d'article du magazine Objectif soins : "Le gîte et le couvert, des draps secs et propres, des soins efficaces... Que demander de mieux à l'hôpital?" . Oui, j'ai été très bien soigné, le personnel a été aimable, souriant et pourtant tout reste à faire en matière de communication. Le malade n'est reconnu que corps-malade duquel le sujet est absent. Cette absence d'identité se manifeste, par exemple, sous la forme d'une absence d'identité du personnel. C'est-à-dire que l'on ne sait pas si on a affaire à une A.S.H., une infirmière ou je ne sais quoi. Bien qu'un badge soit sur la blouse de chacun mais à moins de se rapprocher les yeux près de la poitrine de la personne, il est bien difficile de connaître le nom ou la fonction. Seuls les médecins, (pas même l'interne), se sont présentés à moi. Sans doute veulent-ils (elles) éviter d'être pris pour un ambulancier ou une femme de service! Pourtant il existe d'excellentes vidéocassettes de formation sur le thème de l'accueil. Il y a donc tout un travail, élémentaire, pour apprendre à se présenter, pratique qui demande à être développée dans la culture française, et plus particulièrement dans l'Administration d'Etat où l'anonymat a été longtemps une pratique normale et recommandée.
A titre de conclusion pour tenter de réaliser l'accomplissement de l'exigence suivante: "Le travail doit satisfaire les trois dimensions de l'homme: l'instinct, avec le pouvoir ou le profit; l'affectivité avec l'esprit de corps ou la fraternité du groupe; et l'idéal, avec un projet, voire une morale d'entreprise" . (Service compris - Bloch & Hababou) .
Un lien pour aller plus loin avec les travaux de l'Université de Lille
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